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" Ваіsе m'encor, reЬаіsе-moi et Ьаіsе " - Labé - Littérature & poésie

Sujet de discussion : " Ваіsе m'encor, reЬаіsе-moi et Ьаіsе " - Labé
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 9 juillet 2014 à 02:03



    Indiqué par Gaël76 (Merci !!!)

    Par Hélène Martin, celle qui a mis en musique et interprété "Le condamné à mort" de Jean Genet.

    Ваіsе m'encor, reЬаіsе-moi et Ьаіsе ;
    Donne m'en un de tes plus savoureux,
    Donne m'en un de tes plus amoureux :
    Je t'en rendrai quatre plus сhаuԁs que braise.

    Las ! te plains-tu ? Çà, que ce mal j'apaise,
    En t'en donnant dix autres doucereux.
    Ainsi, mêlant nos Ьаіsегs tant heureux,
    Jouissons-nous l'un de l'autre à notre aise.

    Lors double vie à chacun en suivra.
    Chacun en soi et son ami vivra.
    Permets m'Amour penser quelque folie :

    Toujours suis mal, vivant discrètement,
    Et ne me puis donner contentement
    Si hors de moi ne fais quelque saillie.

    De Louise Labé (1524-1566)

    - "Ваіsег" a ici le sens de "donner un Ьаіsег" et non de "faire l'amour" à la mode du vingtième siècle.
    - "Discrètement" signifie "avec retenue"
    - "Faire quelque saillie" est une métaphore issue du langage militaire "faire sune sortie".
    - A noter qu'en moyen français, la langue de Louis Labé, il n'y a pas comme en français moderne, l'obligation d'un sujet manifeste, ainsi qu'il apparaît dans le dernier tercet ; en cela, le moyen français hérite de l'ancien français, où comme en latin et dans de nombreuses langues romanes, la terminaison du verbe suffit à indiquer le temps et la personne.

    Poème inspiré d'un poème de Catulle. Le cinquième que voici traduit :

    Vivons, ma Lesbie, pour nous aimer,
    Et moquons-nous des vains murmures
    Des tristes vieillards.
    Les soleils peuvent s'éteindre et se rallumer ;
    Pour nous, lorsque s'est éteinte la brève lumière,
    Il nous faut dormir une nuit éternelle.
    Donne-moi mille Ьаіsегs, puis cent,
    Puis mille autres, puis encore cent,
    Puis mille autres, puis cent.
    Alors, après que nous aurons donné des milliers de Ьаіsегs,
    Brouillons-en le compte, au point de ne plus savoir,
    Et que ce compte impossible pour nous comme pour eux
    Nous mette hors d'atteinte des jaloux.
    (la source : http://www2.ac-lyon.fr/enseigne/lettres/louise/sonnets/xviii.html)
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 9 juillet 2014 à 02:11
    Oui, se dévorer de Ьаіsегs,

    brouiller le compte de ceux-ci,

    que la suite en soit indéfinie

    et donc toujours à recommencer

    pour reprendre le compte des entrelacs

    de nos langues fouillant nos âmes !


    C'est là l'amour tel que le conçoit en imagination Louise Labé, et tel qu'elle aura eu peu l'occasion de le mettre en pratique, si nous nous référons à ce que nous connaissons de sa vie.

    Et si nous acceptons que ces sonnets - dont ce dix-huitième - sont bien de sa main et non un canular poétique formant la sensibilité d'une créature de papier" (voir plus bas le sujet "Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie" à propos des doutes de la critique littéraire sur l'auteur Louise Labé).


    -------------------------------------------------------------------------

    Quoi qu'il en soit, ces sonnets sont des plus admirables de la langue française, et de la langue amoureuse, et de l'expression d'un désir féminin.

    Ils sont uniques dans la langue française (mais je ne vous épargnerai pas les amazones du début du vingtième siècle qui eurent bien du сhагmе et des ardeurs, elles aussi).

    Un renvoi à l'ensemble des sonnets, un renvoi qui a le désavantage de démembrer la construction du livre des sonnets, puisque nous avons là un classement alphabétique par les incipits (les premiers vers qui donnent un titre à chacun des sonnets).

    http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/louise_lab/louise_lab.html

    J'apprécie particulièrement, outre "Ваіsе m'encor, reЬаіsе-moi et Ьаіsе", et "Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie", les trois sonnets commençant par l'invocation "Ô" et celui ԁéЬutапt par l'exclamation "Oh !", car ce sont les plus charnels !!!

    Le blason du corps féminin

    était un genre traditionnel ;

    l'on peut estimer que Louise Labé

    crée le blason du corps masculin

    dans ces quatre sonnets.
  • textoo Légende urbaine
    textoo
    • 9 juillet 2014 à 09:03
    Bonjour Climax,

    Voila qui aurai parfaitement illustrer la journée du Ьаіsег !

  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 9 juillet 2014 à 22:12
    Bonjour Climax,

    Voila qui aurai parfaitement illustrer la journée du Ьаіsег !


    Oui, Textoo, ce poème est délicieusement éгоtіԛuе, il est dédié au рlаіsіг des аmапts, il est l'expression d'une fringale sans fin et sans borne prévisible de ces langues entortillées à perdre le souffle.

    Louise Labé, au 16e siècle, bien plus que d'autres (et à mon avis davantage que Pierre de Ronsard), a su exprimer le désir ; il est vrai qu'elle n'était pas appointée par la Cour, elle, ce qui lui a donné une liberté de ton...

    Des poètes dits mineurs sont des grands, et c'est le cas de Louise Labé, pour ses sonnets qui sont seulement vingt quatre !

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