La Révolution Portugaise -Sources documentaires - Loisirs & passions

Je viens juste de découvrir, très bien fait, un panorama des événements de la Révolution portugaise, commençant le 25 Avril 1974 par un putsch des "Capitaines d'Avril" qui aura fait tomber le régime corporatiste et colonialiste portugais (48 années d'oppression), et se prolongeant par une lutte acharnée des classes sociales.


La "Casa Comum - desenvolvido pela Fuпdação Mário Soares" (du nom de l’ancien Secrétaire général du Parti socialiste portugais, ancien président de la République portugaise) met en ligne une chronologie détaillée des événements conduisant au 25 Avril et de ces moments d'histoire bouillonnante.


Voici le lien :


http://casacomum.org/cc/dossiers/25abril40anos/


Outre la chronologie, il y a les photographies passionnantes de trois reporters, dont les témoignages agrandis étaient en place, sur les lieux des événements, dans les rues du centre de Lisbonne, pendant mon séjour en Avril/Mai de cette année.


Je préviens de suite les objections: oui, il faut être lusophone et, après tout, le portugais est parlé "seulement" par les Brésiliens, par les Portugais, par les Angolais, par les Mozambicains, par les Capverdiens, par les habitants de la Guinée-Bissau, etc., soit deux cents millions de locuteurs qui la pratiquent comme langue maternelle.


Cependant, les photographies vous donnent AUSSI un autre accès que langagier à ces événements fondateurs du Portugal contemporain : la prise du Convento do Carmo, siège de la Guarde Nationale Républicaine, où s'était réfugié Marcelo Caetano, le successeur de Salazar ; des scènes de rues, une serveuse donnant du café aux soldats insurgés, une dame suivant les nouvelles à la radio, ...



L'histoire du Portugal, c'est ma passion.



Régalez-vous : le principe de ce topique est d'indiquer des sources d'informations ; par exemple, sachez que la "Casa Comum" collecte et préserve les archives du mouvement maoïste M.R.P.P. (devenu Parti Communiste des Travailleurs, Partido Comunista dos Trabalhadores) et de nombreuses autres organisations.


De même pour le projet "Ephemera" de José Pacheco Pereira, ancien maoïste, devenu député du Partido Social Democrata (droite) mais opposant déterminé de l'actuelle coalition au pouvoir du PSD allié au CDS-PP, dont voici le lien ; il préserve des collections essentielles pour l'histoire du mouvement ouvrier portugais.
(Cet homme est remarquable ; mon jugement politique est que c'est un des rares sociaux-démocrates au sens véritable du terme, peut-être le seul ; José Pacheco Pereira est une figure culturelle importante, un homme très attaché aux libertés démocratiques, bref il détonne dans l'actuel PSD portugais).


http://ephemerajpp.com/


Signalons que José Pacheco Pereira, après vingt années de travail, à lire, classer, conserver, a produit un livre capital pour les bibliothèques de conservation sur la presse, les tracts, les publications éphémères du mouvement ouvrier situé à l'extrême-gauche, des années 1960 jusqu'au 25 Avril 1974.


A noter que cette histoire n'est pas seulement politique mais culturelle. Vous y apprendrez bien des faits, des événements mais aussi des faits de mentalité, qui ont débouché sur le 25 Avril 1974.


Ce livre est le suivant, avec le titre "Les armes de papier : publications périodiques clandestines et de l'exil, liées aux mouvements radicaux de la gauche politique et culturelle (1963-1974)" :





Ce livre est disponible chez l'éditeur et peut s'acheter en ligne auprès de la plus ancienne librairie-éditrice de Lisbonne, "a Livraria Bertrand", voici le lien :


http://www.bertrand.pt/ficha/as-armas-de-papel?id=14814866

Un exemple, émouvant, d'archives, scientifiquement organisées selon les normes les plus récentes de la conservation et de la description des documents, est le fonds Amílcar Cabral, dirigeant du PAIGC, Parti Africain pour l'Indépendance de la Guinée et du Cap-Vert, un ensemble de 27 000 pages, dont des pages autographes du dirigeant africain donnant à voir les brouillons d'importantes déclarations programmatiques, un ensemble de 1 300 photographies - tout ceci sauvé grâce à l'acharnement de sa fille, Iva Cabral et grâce au professionnalisme de "A Casa Comum".


Le 25 Avril 1974 avait pour finalité première, je le rappelle, la fin des guerres coloniales, qui poussaient à la désertion des milliers de conscrits et qui appauvrissaient une nation - déjà arriérée économiquement du fait des monopoles privés intéressés à exploiter une main-d’œuvre peu chère, donc peu formée - en lui suçant le plus grande partie de son budget, obligeant ainsi près d'un million et demi de Portugais à émigrer pour ne pas crever de faim.


Le lien vers les archives Amílcar Cabral :


http://casacomum.net/cc/arquivos?set=e_2617

Autre fonds documentaire important, celui du MFA, Mouvement des Forces Armées, qui est l'institutionnalisation des "Capitaines d'Avril", ces officiers subalternes qui de fait bien davantage que leurs aînés plus haut gradés surent mener à bien, sans "fuite" les dénonçant, avec un parfait réseau de communications, et sans provoquer de bain de sang (les morts furent du seul fait de la police politique du régime fasciste-corporatiste, la PIDE, et de ses éléments assistant à la fin de leur monde).

Le MFA a toujours oscillé, malgré son programme de base "rendre la démocratie aux Portugais", parce qu'une révolution est une intense phase de la lutte de classes sociales pour la conquête du pouvoir d’État, entre une organisation tendant à absorber toutes les forces armées, pour que soit imposée une nouvelle discipline - c'était l'option du général Costa Gomes - et une organisation menant des campagnes d'alphabétisation, se situant comme mouvement apartidaire du côté des exploités, promouvant des campagnes de "prises de conscience", et s'attachant à une option socialiste (à remarquer que le PPD, ancêtre du PSD, le principal parti de la droite portugaise, se réclamait alors, lui aussi, du socialisme !) - et c'était l'option du général Vasco Gonçalves.


Vous verrez là les bulletins d'information émanant de la Commission de Coordination du Programme du MFA.. "Pour rendre public les informations sur la situation économique, sociale, politique et militaire, après le 25 Avril 1974".


Notons que l'Association 25 Avril, association regroupant les militaires auteurs du coup d’État ayant abattu le régime fasciste, a confié ces rares documents à la "Casa Comum", parce que cette dernière a le souci de préserver matériellement et d'assurer la description et enfin la diffusion de documents, pour atteindre un vaste public et ainsi restituer au peuple son histoire !!!


Le lien :


http://casacomum.net/cc/arquivos?set=e_3147

Ne laissons pas de côté l'entreprise gigantesque et, il l'avoue lui-même avec humour, "mégalomane" de José Pacheco Pereira.


Pointons vers les fonds concernant la censure en vigueur au Portugal, censure et préalable et a posteriori de la Police Internationale de Défense de l’État, la PIDE : vous pourrez voir les fameux petits cartons dument calibrés, numérotés, dactylographiés, signés, portant avis de laissez-passer ou d'interdiction, et finalement tamponnés avec "proibido" ("interdit") ou "autorizado" ("autorisé") en haut à droite.


Les critiques étaient des capitaines, lieutenants, et autres commandants, toutes têtes bien-pensantes et manifestement toutes indiquées selon le régime fasciste pour juger des œuvres de l'esprit.


Oui, рéпétгеz au milieu du monde du soupçon institué. Et comprenez une des raisons du 25 Avril 1974 !


Donc dans "Ephemera, biblioteca e arquivo de José Pacheco Pereira" :


http://ephemerajpp.com/category/arquivo/arquivo-da-censura/


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Un exemple, à propos d'un livre d'essais de Simone de Beauvoir, "Privilèges" :



Recto



Verso


Où l'on apprend que :

- la "compagne" de Jean-Paul Sartre (oh, elle n'était pas mariée avec Sartre, scandale et honte) était une ancienne députée communiste (faux, où le censeur avait-il été pêché cela ?) ;

- elle tente, à propos du Marquis de Sade, d'expliquer et jusqu'à un certain point d'excuser le sadisme, arrivant à des conclusions qui font violence à la morale ;

- elle défend Sartre contre Maurice Merleau-Ponty avec des arguments frappés au coin du marxisme ;

- le deuxième essai est une attaque frontale et minutieuse contre les valeurs morales et idéologiques de l'"Occident".

Conclusion : à prohiber ; en interdire la circulation dans le pays.

Ce sujet, je l'espère, aura au moins été utile à quelqu'un.

Et j'espère que mon рlаіsіг à le rédiger aura rejoint des рlаіsігs à le consulter.

Mais comme disait l'autre "Alea jacta est" ; c'est la loi du genre.

Cordialement à ceux qui passent par ici.

Climax69007.