"El Desdichado" - Gérard de Nerval

Parmi les romantiques, à l'opposé de Dumas père qui représentait le versant ensoleillé du romantisme, il y eut Gérard de Nerval.

Certes il se promenait en tenant en laisse un homard, certes il aura écrit des textes portant pour titres des prénoms de femmes, il aura voyagé et écrit des récits de voyages, mais il aura aussi écrit "Les Chimères", un ensemble de sonnets qui donne à la critique du fil à retordre, car le texte est rien moins que transparent, et parmi ces noirs diamants, "El Desdichado" n'est pas le moins obscur.

Cependant quelle harmonie, et le mystère pour être grand mérite d'être scruté, et d'abord entendu ; après tout, un texte est irréductible à ses composants, ce n'est pas une mécanique que l'on pourrait démonter ; et, si l'on prend un texte pour une mécanique, il ne donnera rien de sa substance.

La lecture et l'écoute ne peuvent être que sensibles, évocatrices, se couler le long des mots et des phrases, et s'ouvrir ainsi au mystère.


Et si toute lecture était d'abord une initiation à un monde intérieur singulier, avec lequel chacun rentrera plus ou moins en résonance ?


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El Desdichado

Je suis le ténébreux, le veuf, l'inconsolé,
Le prince d'Aquitaine à la tour abolie :
Ma seule étoile est morte, et mon luth constellé
Porte le soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du tombeau, toi qui m'as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d'Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé,
Et la treille où le pampre à la rose s'allie.

Suis-je Amour ou Phébus ?... Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encore du Ьаіsег de la reine ;
J'ai rêvé dans la grotte où nage la sirène...

Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d'Orphée
Les soupirs de la sainte et les cris de la fée.

Gérard de Nerval


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Un de mes poèmes préférés....(soupir de contentement)

J'aime beaucoup. Merci pour cette découverte, Climax (ou re-découverte, car le nom du guy et le début du poème me disent tous deux quelque chose...).
Je n'ai pas écouté la vidéo, par contre. Faudra que je repasse tester ça !

J'aime beaucoup. Merci pour cette découverte, Climax (ou re-découverte, car le nom du guy et le début du poème me disent tous deux quelque chose...).
Je n'ai pas écouté la vidéo, par contre. Faudra que je repasse tester ça !

Voilà, je n'ai pas la prétention de faire découvrir ; par contre, si cette halte a pu te faire savourer de la beauté, t'intriguer, te mettre aussi en appétit, elle est là, toujours ouverte, et pour moi Nerval va en prendre plus de relief : il n'y a que dans le partage que l'on peut justement apprécier un texte.


Rappelons que Gérard de Nerval est publié en livre de poche. Je recommande la version de l'édition Garnier-Flamarion, parce que les notes utiles y sont sans étouffer le texte.

Tout à fait ! J'ai écouté la vidéo, entre-temps, et je dois dire que la diction m'a également ému (fait assez rare pour être signalé). Je garde le livre que tu cites en tête, à l'occasion (et quand j'aurai un petit peu épuisé mon "présent" stock) ! Thanks.

Scar, c'est avec рlаіsіг !