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Rosalía de Castro, poétesse de la Galice - Littérature & poésie

Sujet de discussion : Rosalía de Castro, poétesse de la Galice
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 1 août 2013 à 20:32
    Rosalía de Castro a été une femme remarquable par sa sensibilité et sa capacité d'expression, dans la Galice du dix-neuvième siècle.

    Écrivant parfaitement en castillan (en espagnol), Rosalía de Castro n'en a pas pour autant dédaigné cette langue galicienne, qui à son époque n'avait plus personne pour l'écrire.

    Cependant, le mouvement des nationalités qui agitaient l'Europe au dix-neuvième siècle, la renaissance des langues en déshérence sous les langues imposant leur empire, et l'imposant au prix d'un dépouillement culturel et d'un asservissement des peuples n'ont pas épargné l'Espagne, dont la doctrine étatique - réaffirmée par le caudillo Franco - était : "Un pays, un peuple, une langue", doctrine refusant la réalité qu'est la mosaïque des peuples et des langues constitutifs de l'Espagne.

    Rosalía de Castro a senti, pensé, rêvé, imaginé, et créé de ces grandes œuvres littéraires qui marquent, pour une langue, le début d'une nouvelle efflorescence, la rétablissant dans sa dignité, par des vers ayant un sens aigu de la nature ainsi qu'un grand sens des événements historiques (écoutez plus loin le très beau et émouvant "Chant de l’Émigration", interprété par le chœur de Coimbra, un soliste et un orchestre symphonique).


    Il est paru, aux éditions Folle Avoine (qui fabriquent toujours de beaux livres) en coopération avec les Presses Universitaires de Rennes ce volume bilingue qui est un régal (au prix de vingt-trois euros) :

    9782868101556FS.gif

    Si vous lisez le portugais, vous pourrez, après un temps d'adaptation, lire "Poesia completa en galego", au prix de treize euros, aux éditions Xerais de Galícia, livre dont le numéro identifiant ISBN est 84-7507-004-3.

    Des poèmes de Rosalía de Castro ont été adaptés, entre autres par Carlos Núñez et Luz Casal, pour "Negra sombra", qui suit.

    Les deux poèmes qui suivent sont légendés, l'un en galicien selon l'orthographe officielle hispanisante en usage dans la région autonome de Galice, et pour le "Chant de l'émigration", gommant les particularités dialectales du galicien, selon l'orthographe du portugais.








    Et comment résister à cette interprétation de Joan Baez, oh combien maladroite, mais qui me confirme que cette femme a toujours eu un sens élevé et généreux de l'internationalisme, un grand respect de la diversité culturelle, et une grande curiosité pour le monde tel qu'il est.

    Joan Baez m'émeut toujours !!!

    Notez que le public connaît par cœur ce poème qui est un classique galicien et aide Joan Baez à déchiffrer le texte qu'elle a oublié.

    C'était en Galice, l'année 2010.


    Et pardonnez que ce ne soit pas légendé en galicien.




    -------------------------------------------------------------------------------------


    Un petit supplément, parce qu'il faut toujours donner de soi-même dans ce type de sujet, pour son plus grand рlаіsіг (oui, c'est très égoïste, en un premier temps, que croyez-vous ???)

    Une traduction personnelle de ce que commence à chanter Joan Baez..

    Je sépare, sur une même ligne, le texte originel de ma traduction par un tiret : c'est le seul moyen de les maintenir en regard. Et aussi, en mettant au moins un espace entre chaque ligne pour que le texte consente à bien s'ordonner !!! Nom de Zeus !

    Je mets un (+) là où je conçois des doutes quant à l'exactitude de ma traduction.

    AVANT QUE VOUS NE LISIEZ.

    Je reconnais que les sentiments exprimés par Rosalía de Castro peuvent paraître "grandiloquents" au goût de notre époque.

    Néanmoins, je vous invite à vous mettre dans la peau de l'émigrant, de celui qui partait peut-être pour toujours, et qui dans ce mouvement de déchirure іпtіmе, ne pouvait plus qu'évoquer, en les nommant, et en les acсumulant dans sa mémoire, les lieux familiers, les lieux aimés, ceux de ses amours et de sa tendresse filiale.



    Adiós, ríos; adios, fontes... - Adieu, mes fleuves, adieu, fontaines...





    Adiós, ríos; adiós, fontes ; - Adieu, mes fleuves, adieu, fontaines ;

    adiós regatos pequenos ; - adieu, mes adorés ruisseaux ;

    adiós vista dos meus ollos ; - adieu vous régalez mes yeux ;

    non sei cándo nos veremos. - je ne sais quand nous nous verrons.




    Miña terra, miña terra, - Ma terre, ma très chère terre,

    terra donde me eu criéi, - chère terre qui m'a nourri,

    hortiña que quero tanto, - petit jardin que j'aime tant,

    figueiriñas que prantéi, - figuiers très chers que j'ai pleurés,

    prados, ríos, arboredas, - prairies, fleuves et arbres dressés,

    pinares que move o vento, - pinèdes remuées du vent,

    paxariños piadores, - petits oiselets pépiant,

    casiña do meu contento, - maison de mon contentement,

    muíño dos castañares, - moulin dans les châtaigneraies,

    noites craras de luar, - nuits éclaircies du clair de la lune,

    campaniñas trimbadoras - cloches qui tintinnabulez

    da igrexiña do lugar, - dans l'église de mon village,

    amoriñas das silveiras - petites baies dans les futaies (+)

    que eu Ile daba ó meu amor, - auxquelles allait ma préférence,

    camininos antre o millo, - petits chemins dans le millet,

    ¡adiós, para sempre adiós ! - adieu, et adieu pour toujours !

    ¡Adiós, groria! ¡Adiós, contento ! - Adieu, honneur, contentement !




    ¡Deixo a casa onde nacín, - Je quitte la maison où je suis né,

    deixo a aldea que conoso - je quitte le village familier

    por un mundo que non vin ! - pour un monde que je n'ai jamais vu !

    Deixo amigos por estraños, - Je quitte des amis pour des étrangers,

    deixo a veiga polo mar, - Je laisse le champ cultivé pour la mer,

    deixo en fin canto ben quero. - Je laisse, enfin, tout ce que j'aime tant

    ¡Quén pudera no o deixar...! - Si je pouvais ne pas l’abandonner... !




    Mais son probe e, ¡mal pecado!,- Je suis pauvre et par malheur,

    a miña terra n'é miña, - ma terre ne m’appartient pas,

    que hasta lle dan de prestado - et même est seulement louée

    a beira por que camiña - la bordure par où chemine

    ó que nacéu desdichado. - l'homme né sous un mauvais signe.




    Téñovos, pois, que deixar, - Ainsi, il me faut vous quitter,

    hortiña que tanto améi, - doux jardin que j'ai tant aimé,

    fogueiriña deo meu lar, - douce cheminée de mon foyer,

    arboriños que prantéi, - doux arbres que j'ai pleurés,

    fontiña do cabañar. - douce fontaine de mon étable. (+)





    Adiós, adiós, que me vou,- Adieu, adieu, voici que je m'en vais,

    herbiñas do camposanto - douces herbes de ma terre sacrée,

    donde meu pai se enterróu, - lieu où mon père est enterré,

    herbiñas que biquéi tanto, - herbes que j'ai tant suçotées,

    terriña que vos crióu. - terre qui vous a fait lever.




    Adiós, Virxe da Asunción, - Adieu, vіегgе de l'Assomption,

    branca como un serafín : - comme un séraphin de blancheur :

    lévovos no corasón ; - je vous emporte dans mon cœur ;

    pedídelle a Dios por min, - pour moi faites prière à Dieu,

    miña Virxe da Asunción. - ma Vіегgе de l'Assomption.

    Xa se oien lonxe, moi lonxe, - Voici qu'on entend loin, très loin

    as campanas do Pomar ; - les cloches qui sonnent à Pomar ;

    para min, ¡ai!, coitadiño, - pour moi, ah ! pauvre malheureux,

    nunca máis han de tocar. - plus jamais elles ne sonneront.

    Xa se oien lonxe, máis lonxe... -Oui, on les entend loin, très loin...

    Cada balada é un dolor ; - Chaque tintement m'est douleur ;

    vourne soio, sin arrimo. - je m'en vais seul, sans nul soutien.





    Miña terra, ¡adiós!, ¡adiós! - Ma terre, adieu ! adieu !

    ¡Adiós, tamén, queridiña. - Adieu, aussi, ma tendre aimée.

    ¡Adiós, por sempre quizáis. - Adieu pour toujours peut-être.

    Dígoche este adiós chorando - Je te dis ces adieux en pleurs

    desde a beiriña do mar. - depuis les rives de la mer.

    Non me olvides, queridiña, - Ne m'oublie pas, ma tendre aimée,

    si morro de soidás... - si je meurs d'être solitaire...

    Tantas légoas mar adentro... - Tant de lieues au travers des mers...

    ¡Miña casiña!, ¡meu lar! - Ma maisonnette ! Mon foyer !!!


    Traduction de Climax69007, le Jeudi Premier Août 2013, à 23h.


    Essayer de rendre, par un rythme équivalent en français, des vers de sept pieds, pour lesquels, selon l'habitude hispanique et portugaise, on ne compte pas l'éventuelle syllabe inaccentuée supplémentaire et ultime, ce n'est pas possible.

    J'ai donc dû choisir, c'est le moindre mal, une certains harmonie rythmique, avec des octosyllabes majoritaires -certains ne tombant juste qu'à la condition d'une ellipse -, et plus rarement avec des décasyllabes, et encore plus furtivement - en un seul passage - avec des hendécasyllabes, c'est-à-dire des vers de onze syllabes.


    Les multiples formes diminutives qui parsèment ce poème expriment, deux nuances: une nuance affective, et ce sont alors des mots "hypocoristiques" ainsi qu'on les nomme dans le langage technique de la stylistique ; et une nuance diminutive proprement dite, comme si dans le départ, en réduisant les lieux et les sons et les êtres aimés, et en les miniaturisant, celui qui s'exile pour ne pas crever de faim constituait ses souvenirs en un monde intérieur portatif.
  • yoomy Membre suprême
    yoomy
    • 1 août 2013 à 21:15





    Presque rien à voir mais, merci pour l'apport culturel climax.
    Fan inconditionnel de Luz Casal, que je suis en train d'écouter en ce moment, ça tombe bien ^^
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 1 août 2013 à 22:32
    Merci, Yoomy !!!

    Luz Casal est née dans les Asturies, cette région du Nord-Ouest espagnol limitrophe de la Galice - où l'on pratique une langue distincte du castillan, représentée dans les festivals inter-celtiques - et elle ne pouvait que prêter le grand сhагmе de sa voix pour interpréter des chants en galicien.

    En effet, elle est habituée à la diversité linguistique : l'asturien (dont je vois que la vivacité est précaire) est de la même famille linguistique, l'astur-léonais (référence à l'ancien royaume de León) que la langue parlée à Miranda do Douго, dans la région montagneuse du Nord-Est portugais, la région de Trás-os-Montes, le mirandais, qui est la deuxième langue officielle du Portugal.


    Merci pour le merci

    C'est toujours avec рlаіsіг dans ces conditions.

    Vraiment.

    Pour faire plasir à Yoomy, sur un site de la Galice qui porte le très beau nom, évocateur, de "A viagem dos Argonautas", une version de la même chanson, "Negra Sombra ", mais avec Luz Casal filmée sur scène.

    Elle a une grande présence expressive et dramatique.


    http://aviagemdosargonautas.net/2011/11/30/musica-galega-negra-sombra-rosalia-de-castro-luz-casal/
  • yoomy Membre suprême
    yoomy
    • 1 août 2013 à 22:44
    De rien

    J'apprécie ton goût des "régionalismes", mais tu le sais déjà.

    Et merci pour la dédicace ^^
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 1 août 2013 à 23:48
    Tu sais, Yoomy, ce que l'on nomme le "régionalisme" représente, pour moi, la diversité culturelle.

    Dans un pays comme l'Espagne, où la royauté qui a succédé à Franco -selon le souhait de ce dernier - a noyé les peuples distincts (Catalans, Galiciens, Basques, Castillans) dans une régionalisation négatrice du droit des peuples à s'autodéterminer, la question reste posée, de la liberté des peuples, et seule une république fédérant les peuples ibériques dans l'égalité (ce qui implique le droit de se séparer) pourra enfin donner à l'Espagne sa vraie mesure.

    Mon "régionalisme", par ailleurs (mais tu le sais bien) n'est pas une affaire ethnique, d'enracinement, d'identité à maintenir, bref, ce n'est pas un nationalisme des petits peuples, destiné à faire exploser la France, sous prétexte d'Occitanie ou de pays flamand ou de grande région d'Alsace (liée au pays Rhénan).

    Non, je suis partisan de la reconnaissance de la pluralité culturelle, ici, ce qui implique aussi la reconnaissance des langues des migrants en France, et ailleurs, en Calédonie, aux Antilles (les derniers confetti de l'empire colonial français, malgré leur appellation de "départements d'outre-mer") la reconnaissance d'une identité créole et antillaise.

    Voilà, c'était à l'usage des autres intéressés par ce sujet, pour qu'ils ne se méprennent pas.

    Bref : ce n'est pas moi que l'on fera mourir pour défendre le territoire de Clochemerle. Déjà que la France ne provoque pas en moi un sentiment d’appartenance, alors bon !

    ----- Navré, Yoomy, je ne veux pas te noyer sous des discours, mais je ne peux pas m'empêcher de dire cela à propos du mot "régionalisme". Décidément, il faudrait me bâillonner, des fois !!!
    Décidément, j'ai la fibre politique ! et la fièvre politique galopante !
  • yoomy Membre suprême
    yoomy
    • 2 août 2013 à 00:12
    .
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 2 août 2013 à 00:32
    D'autres poèmes de Rosalia de Castro interprétés, chantés, et légendés !!!

    Par une chогаlе des Asturies, qui s'applique et qui ne massacre pas trop le texte, quand bien même je perçois par ci par là des tendances aux couacs ; ce ne sont pas des professionnels, et après tout chanter Rosalia de Castro n'est pas facile.



    Et un poème de Rosalia de Castro, qui étiat aussi une grande de la langue espagole ; poème nullement chanté, mais accompagné par une musique merveilleusement interprétée ; un poème sur le départ hors de la Galice..

    --- Si Jiminy, qui est un connaisseur de musique dite classique, par hasard passait par ici et pouvait identifier cette musique, ça m'aiderait : c'est vif, énergique, magistral !

    Merci !


  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 2 août 2013 à 01:19
    D'autres poèmes de Rosalía de Castro interprétés, chantés, et légendés !!!

    Par une chогаlе des Asturies, qui s'applique et qui ne massacre pas trop le texte, quand bien même je perçois par ci par là des tendances aux couacs ; ce ne sont pas des professionnels, et après tout chanter Rosalía de Castro n'est pas facile.



    Et un poème castillan de Rosalía de Castro, qui était aussi une grande de la langue espagnole ; poème nullement chanté, mais accompagné par une musique merveilleusement interprétée ; un poème sur le départ hors de la Galice..

    --- Si Jiminy, qui est un connaisseur de musique dite classique, par hasard passait par ici et pouvait identifier cette musique, ça m'aiderait : c'est vif, énergique, magistral !

    Merci !


  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 2 août 2013 à 01:34
    Yommy

    Bonne nuit.
  • yoomy Membre suprême
    yoomy
    • 2 août 2013 à 01:47

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